Sur la délinquance des jeunes, Gabriel Attal est déconnecté de la réalité
Les « travaux d’intérêt éducatif » pour les mineurs de moins de 16 ans annoncés par le Premier Ministre ne reflètent pas les priorités des éducateurs de la protection judiciaire de la jeunesse
« Tu casses, tu répares, tu salis, tu nettoies, tu défies l’autorité, on t’apprend à la respecter. » Ce moment du discours de Gabriel Attal mardi 30 janvier face à l’Assemblée nationale a deux mérites : il se prête parfaitement à la parodie, et est une bonne illustration de la politique du gouvernement en matière de justice pénale des mineurs.
C’est en tout cas le sentiment chez certains agents de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ). « Aujourd’hui, toutes annonces qui sont faites par rapport à la justice des mineurs sont des mesures réactionnaires et purement médiatiques, commente Josselin Valdenaire, éducateur et secrétaire général de la CGT PJJ. Nous, on défend la primauté de l’éducatif sur le répressif. Et on a l’impression que les annonces qui sont faites par le gouvernement depuis quelques années sont essentiellement des mesures répressives ou sécuritaires. »
Au-delà de sa punchline, Gabriel Attal a profité de son discours de politique générale pour revenir sur les émeutes de l’été 2023 et annoncer (ou répéter) certaines mesures concernant la prise en charge de la délinquance juvénile. Parmi les nouvelles annonces : la mise en place de « travaux d’intérêt éducatif » pour les mineurs de moins de 16 ans. Une sanction prévue comme un équivalent aux travaux d’intérêt général, réservés aux plus de 16 ans.
« On réinvente l’eau chaude »
Gabriel Attal n’a pas davantage précisé ces nouvelles mesures, mais selon les informations du Parisien, qui cite le ministère de la Justice, ce travail d’intérêt éducatif concernera les mineurs de 13 à 16 ans, et « sera composé d’un suivi éducatif avec des enseignements et une sensibilisation aux questions de justice et de civisme. [Il] pourra comporter des modules de formation et sera effectué auprès d’associations ou de collectivités locales ».
Chez les professionnels de la protection judiciaire de la jeunesse, ces mesures n’ont pas l’air de convaincre. Pour Eric Achard, Secrétaire fédéral de la CFDT justice et éducateur de formation, « ça sent l’effet d’annonce, on réinvente l’eau chaude ». L’éducateur cite notamment le module de réparation pénale, un outil qui fait déjà partie de l’arsenal des juges.