Supprimer des jours fériés : un remède inefficace et injuste

En annonçant vouloir supprimer deux jours fériés, parmi lesquels le 8 mai et le lundi de Pâques, au nom des économies budgétaires, le gouvernement choisit une voie à la fois symbolique et contestable. Derrière l’argument d’efficacité économique, c’est en réalité une mesure de facilité, qui fait porter l’effort à nouveau sur les salariés, au moment même où le pouvoir d’achat s’érode et où les conditions de travail se dégradent dans de nombreux secteurs.

Avec ses 11 jours fériés, la France n’est pas une exception : elle est même en deçà de la moyenne européenne. Des pays comme Chypre (15 jours), l’Espagne, la Croatie ou la Bulgarie (14 jours) offrent davantage de repos à leurs citoyens sans que cela ne semble nuire à leur économie. Supprimer ces jours fériés reviendrait à réduire un temps de pause collectif essentiel, sans bénéfices démontrés. Car les études le montrent : le lien entre réduction des jours de repos et gain de productivité est loin d’être établi. En réalité, une population fatiguée, stressée et démotivée est souvent moins efficace.

Plus encore, ces jours fériés ont une valeur symbolique forte. Le 8 mai, jour de la capitulation nazie, ou le lundi de Pâques, ancré dans notre calendrier culturel, sont des repères dans la vie sociale et historique du pays. Les supprimer, c’est aussi banaliser leur sens, au nom d’une logique comptable court-termiste.

Cette mesure envoie un message inquiétant : dans un pays déjà frappé par les inégalités sociales, on demande aux travailleurs de « faire un effort », pendant que d’autres leviers bien plus puissants, comme la lutte contre l’évasion fiscale ou la rationalisation de certaines dépenses publiques, restent peu explorés. Supprimer des jours fériés, c’est faire croire que l’austérité passe forcément par des sacrifices populaires, et non par une refonte structurelle du budget de l’État.

Dans un monde du travail où les temps de repos sont de plus en plus grignotés — horaires étendus, mails professionnels hors du bureau, flexibilité imposée — ces jours fériés sont des respirations précieuses. Les attaquer, c’est remettre en cause un équilibre déjà fragile entre vie professionnelle et vie personnelle.

Non, supprimer deux jours fériés ne sauvera pas les finances publiques. Mais cela en dira long sur les choix de société que nous faisons : ceux où l’on rogne encore et toujours sur les droits des plus exposés, plutôt que de chercher des solutions structurelles et équitables.

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