« J’ai élevé mon fils avec la parentalité positive et je culpabilise de ce qu’il impose aux autres »
Quand Joris* est devenu père, il s’est appuyé sur des méthodes de parentalité positive pour éduquer son fils. Aujourd’hui « un peu au bout du rouleau », voici ce qu’il aurait aimé qu’on lui dise avant de se lancer.
Avant que ma femme ne tombe enceinte de notre premier enfant, je ne m’étais jamais posé de questions sur les différentes méthodes d’éducation. Petit à petit, entre les recommandations de livres et les recherches sur internet, j’ai découvert le vaste monde des conseils en parentalité.
Dans l’ensemble, les enseignements soulignaient l’importance d’accompagner le développement de son enfant en fonction de ses besoins et de l’éduquer sans violence, ce à quoi nous avons évidemment adhéré. La plupart des contenus qui nous semblaient pertinents se réclamaient de l’éducation positive.
L’envers du décor de la parentalité positive
Certains conseils étaient très précis (le fameux « il ne faut pas dire non », l’utilisation d’un timer…), d’autres étaient un peu plus vagues. Ce qui ne correspondait pas à cette méthode éducative était presque toujours présenté comme violent, inefficace ou inadapté au regard des nouvelles connaissances scientifiques.
Au gré des « techniques » de parentalité piochées sur les réseaux sociaux, la parentalité positive est devenue notre mode d’éducation principal presque sans le vouloir. Avec ses qualités, mais aussi ses écueils, dont j’aurais aimé qu’on me parle plus tôt. Aujourd’hui, mon fils aîné a 4 ans et demi et je voudrais parler de l’envers du décor. De tout ce que l’éducation positive peut avoir de négatif et culpabilisant, et dresser un bilan de ma vie de parent un peu au bout du rouleau.
Car ce qu’on ne dit pas, c’est qu’en fonction de chaque enfant, les choses peuvent se passer très différemment. Pour ma compagne et moi, cela se traduit par une gymnastique incessante et des circonvolutions permanentes pour offrir à notre enfant aîné un cadre sécurisant, tout en cherchant constamment à obtenir son accord. Et la culpabilité terrible de se dire que, si nous ne sommes pas assez patients, notre enfant subira les effets de notre incompétence maltraitante pour le reste de sa vie.
Que fait-on quand ça ne marche pas ?
Si l’idée d’éduquer nos enfants sans violence nous a semblé évidente, nous avons découvert que la définition de la violence n’est pas la même pour tout le monde. Isoler son enfant dans sa chambre ou le manipuler physiquement sans faire de mal (lui mettre ses chaussures ou lui brosser les dents même s’il n’est pas d’accord, par exemple) sont des choses qu’on nous a présentées comme dangereuses, auxquelles il faudrait privilégier le fait de « demander et expliquer ». Mais les livres, podcasts et autres posts Instagram n’envisagent jamais l’option dans laquelle « demander et expliquer » ne fonctionne pas – au point que j’ai longtemps cru que j’étais le seul à galérer avec des activités aussi triviales.
D’un côté, on occulte les fois où ces méthodes ne marchent pas en donnant l’impression que si elles ratent, c’est nous qui ratons, de l’autre, on met l’emphase sur la « violence » des autres manières de faire. Le résultat, c’est une vraie détresse et l’impression qu’il n’y a aucune solution qui fonctionne.
Et en ça, l’éducation positive ne m’a vraiment pas aidé. « Ton enfant ne veut pas rentrer de l’école à vélo ? Mais c’est facile voyons, fais des bruits de chevaux et prétend que vous chevauchez une licorne. Tous les enfants aiment les licornes ! » Et toi, après avoir écouté ton podcast, tu te retrouves sous la pluie, tu tentes la licorne et ton gamin s’en cogne, il ne veut pas monter sur le vélo, il ne mettra pas son casque, il est déjà en train d’enlever ses chaussures, t’as un deuxième enfant à aller chercher et tu ne peux pas être encore en retard chez la nounou cette semaine. La « technique infaillible » ne marche pas. Je ne peux pas saucissonner mon gosse au vélo, c’est maltraitant. Je peux pas lui crier dessus, c’est violent aussi. Il ne reste que des mauvaises solutions (abandonner le vélo, le prendre sur l’épaule et courir jusque chez la nounou).